Le con­seil­ler fédé­ral Beat Jans pré­voit des durcis­se­ments du sys­tème d’a­si­le suisse

Les garan­ties pro­cé­du­ra­les sont en jeu

Le 20 février 2024, le nou­veau minist­re de la Jus­ti­ce Beat Jans a pro­po­sé une série de mesu­res visa­nt à durcir le sys­tème d’a­si­le suis­se. Cel­les-ci visent à ratio­na­li­ser le sys­tème actuel et à durcir le trai­te­ment des deman­deurs d’a­si­le pro­ven­ant de cer­ta­ins pays d’origine.

Décis­i­ons d’a­si­le dans les 24 heures

Les nou­vel­les mesu­res visent à mett­re en place dans tou­te la Suis­se une pro­cé­du­re en 24 heu­res, qui est déjà tes­tée à Zurich.

Dans ce court laps de temps, des cla­ri­fi­ca­ti­ons essen­ti­el­les doi­vent être effec­tuées pour les per­son­nes qui ont peu de chan­ces d’ob­te­nir l’a­si­le. Cela con­cer­ne en par­ti­cu­lier les deman­deurs d’a­si­le pro­ven­ant de pays dont le taux d’oc­troi de l’a­si­le est infé­ri­eur à 1%, com­me l’Al­gé­rie, la Tuni­sie et le Maroc.

Le SBAA con­sidè­re cet­te pro­po­si­ti­on d’un œil cri­tique. Elle se ral­lie aux cri­ti­ques déjà expri­mées par l’Or­ga­ni­sa­ti­on suis­se d’ai­de aux réfu­giés (OSAR) et Amnes­ty Inter­na­tio­nal Suis­se. Un examen minu­ti­eux des motifs de fuite et du beso­in de pro­tec­tion des deman­deurs d’a­si­le néces­si­te du temps. Un délai aus­si court de 24 heu­res est loin d’êt­re suf­fi­sant pour accom­plir cet­te tâche com­ple­xe de maniè­re adé­qua­te et minu­ti­eu­se. La pro­cé­du­re d’a­si­le accé­lé­rée en vigueur depuis 2019 est déjà très ser­rée. Avec une accé­lé­ra­ti­on sup­p­lé­men­tai­re, le ris­que exis­te que les faits ne soi­ent pas suf­fi­sam­ment cla­ri­fiés et que des décis­i­ons erro­n­ées soi­ent pri­ses. Cela peut avoir de gra­ves con­sé­quen­ces pour les per­son­nes en fuite.

Les deman­des d’a­si­le doi­vent être moti­vées par écrit au préalable

Les per­son­nes en fuite pro­ven­ant de pays où les per­spec­ti­ves d’a­si­le sont fai­bles doi­vent en out­re moti­ver leur deman­de d’a­si­le par écrit avant que la pro­cé­du­re pro­pre­ment dite ne com­mence. L’OSAR résu­me la cri­tique : «Il ne faut pas qu’u­ne deman­de d’a­si­le échoue par­ce qu’u­ne per­son­ne ne sait pas écr­i­re, par exemp­le». Même si les per­son­nes en fuite savent écr­i­re, il est extrê­me­ment dif­fi­ci­le de rédi­ger une lett­re pré­li­mi­n­aire sans con­naît­re le sys­tème juri­di­que suis­se et sans assis­tance juridique.

Deman­des d’a­si­le uni­quement pen­dant les heu­res de bureau

Par ail­leurs, les deman­des d’a­si­le ne dev­rai­ent plus pou­voir être dépo­sées que pen­dant la semaine, afin de pré­ve­nir les pré­ten­dus abus des struc­tures d’a­si­le. Les per­son­nes en fuite ne doi­vent donc pas pou­voir être héber­gées dans des cen­tres d’a­si­le le week-end. L’ob­jec­tif est d’é­vi­ter que les cen­tres d’a­si­le soi­ent uti­li­sés com­me une sor­te d’hé­ber­ge­ment tem­po­rai­re pen­dant les week-ends. Les deman­deurs d’a­si­le vul­né­ra­bles, com­me les femmes voy­a­geant seu­les, les famil­les, les mineurs non accom­pa­gnés et les per­son­nes malades ou âgées, doi­vent con­tin­uer à être accu­eil­lis le week-end. Il n’est pas clair du tout com­ment les per­son­nes par­ti­cu­liè­re­ment vul­né­ra­bles, tel­les que les per­son­nes trau­ma­ti­sées ou les vic­ti­mes de la trai­te des êtres humains, peu­vent être recon­nues de maniè­re fia­ble aus­si rapidement.

Le SBAA s’op­po­se fer­me­ment aux mesu­res proposées

Le SBAA deman­de au minist­re de la Jus­ti­ce Beat Jans de renon­cer aux durcis­se­ments pro­po­sés du sys­tème d’a­si­le. Le beso­in de pro­tec­tion des requé­rants d’a­si­le et le respect des nor­mes inter­na­tio­na­les ne peu­vent être garan­tis que par un examen minu­ti­eux de leurs motifs de fuite indi­vi­du­els. Le respect des nor­mes en matiè­re de droits de l’hom­me est essentiel à cet égard. Les mesu­res pro­po­sées sont en con­tra­dic­tion avec les prin­cipes du droit d’a­si­le suis­se, tels que l’ex­amen suf­fi­sant des faits, l’ac­cès à la pro­tec­tion juri­di­que et le droit d’êt­re enten­du. Ces prin­cipes s’ap­pli­quent à tou­tes les per­son­nes qui ont fui leur pays et qui ont mis leur vie en dan­ger pour cher­cher pro­tec­tion en Suisse.